"Fonder son territoire et le défendre, c’est fonder et défendre sa propre identité. Sans lui, il n’est pas de développement ni de conscience. "François Vigouroux. (Dans la peau de la maison)
" Nous naviguons dans nos territoires intérieurs, Terra Incognita." Nikki Elisé aka NeP
Mòn Latrèy Chimen Lavi Début Milieu Fin
(Installation)
Torches ( tòch ) ,matrones , fils rouges emperlés. Ficelles et perles
Socles de bois peints 75cm ht x25 cm l (2 ) 75cm ht x90 cm Long x 25cm large .
Baguettes dorées. Pétales
Dans notre univers d'afro-descendants et de descendants de personnes mises en esclavage, il semblerait que le futile, l’inutile, le décoratif, soit banni. Tout a un sens, tout objet, une utilité, tout est pensé et chaque acte est intentionnel. Pourtant notre Univers est beau et organisé. Et notre culture est solidement ancrée dans cette terre de Guadeloupe, avec les apports multi-culturels que l’on sait.
En reprenant plastiquement les tòch de mon arrière-grand-mère, je revois cette vague photo en noir et blanc, peut-être était-ce juste une coiffe, un « maré tèt » qu’elle portait. Mais cela m'a inspiré cette création.
La torche, tòch en créole est ce foulard ou chiffon entortillé et calé entre le crâne et la charge portée. Il assure un meilleur équilibre du fardeau sur la tête lors du déplacement. Les fardeaux virtuels que nous trimballons nous courbent et nous tassent physiquement. Le port de charge sur la tête, lui nous oblige à un équilibre et un certain maintien, une attitude hiératique. Nos aïeules avançaient confiantes et déterminées.
Pourrait-on imaginer que dans notre monde si fragilisé, la tòch devienne un nouvel objet transitionnel au sens où l’entendait Winnicott ?
Les matrones, héritage de ma mère, jouent le même rôle d’objet transitionnel. Elles recueillent nos confidences, nos joies, nos peines. Comme mes matrones, accrochées à leur socle, je suis ancrée dans ce territoire, je me nourris de ma culture et dans une interaction permanente, je la questionne, la préserve et lui donne vie.
Tout cela s’organise dans un chemin de vie où temporalité et espaces s’entremêlent.
Le passé se conjugue au futur. Hier c’est aujourd'hui et c’est demain. Sa ki pou rété ké rété. Je reste en tant qu’artiste, persuadée que, comme dans notre jardin créole et notre pharmacopée, le remède est tout près de ce qui nous empoisonne. Nos solutions viendront de nous-mêmes.
C’est aussi l’expérience un brin schizophrénique que j’ai faite en revenant à Marie-Galante, terre de mon enfance. Tout est pareil et si différent à la fois, l’enfant d’hier éclaire les pas de l’adulte que je suis devenue. Pon di sou la kilti, mès é tradisyon annou pa pèd !
Morne La Treille, chimen Latrèy, des hauteurs du morne au cimetière de Grand-Bourg.